Manger En Inde
Comme c’est le cas pour la plupart les choses importantes de la vie en Inde, les repas dépendent énormément du contexte. La manière dont on mange, les personnes avec qui on partage son repas, les aliments autorisés ou non, tout ceci est fonction de la caste (jati et varna), du rang que chacun occupe dans la société mais aussi de la situation géographique et de la religion. Ces diverses restrictions confèrent encore plus d’importance à la nourriture et aux repas qui participent à une affirmation de l’identité de chacun et à son appartenance à un groupe. Les habitués des restaurants indiens en Occident seront ainsi surpris de découvrir sur place toute une variété de plats insoupçonnés qui font toute la richesse de la cuisine indienne.
En Inde, le repas remplit donc autant une fonction sociale qu’une nécessité alimentaire. Si vous nous accompagnez au Kerala, au Rajasthan ou au Tamilnadu, vous pourrez observer cela de plus près à chacun des repas que nous prendrons au cours de l’un de nos voyages. Car chacun de nos séjours est aussi un voyage gustatif et sensoriel, et une place importante sera accordée à la nourriture. Vous verrez que manger en Inde est un délice et qu’il y a des plats pour tous les goûts et toutes les habitudes alimentaires.
Manger ensemble
En Inde, la convivialité est réservée à des moments très spécifiques comme les grandes fêtes religieuses ou les mariages. Les règles alimentaires très strictes de chacune des communautés rendent effectivement le fait de manger ensemble, ou « commensalité », problématique dès lors que les convives n’appartiennent pas au même groupe. C’est ainsi qu’il n’existe quasiment pas de restaurants d’entreprise (alors que les cantines scolaires existent, car les enfants sont moins soumis aux lois du dharma) ce qui explique le système de distribution de gamelles très sophistiqué mis en place dans certaines grandes villes (voir à ce sujet le très joli film The Lunchbox de Ritesh Batra sorti en 2013).
Dans les familles, le repas est souvent préparé par la maîtresse de maison (ou un(e) cuisinier(ère)) et chacun mange lorsqu’il revient de ses occupations. S’il existe dans les appartements modernes un endroit spécifique pour manger, il est encore courant que chaque membre de la famille emmène son assiette pour manger dans son coin, souvent assis par terre.
La traditionnelle feuille de bananier sur laquelle le repas est encore servi dans de nombreux restaurants a été remplacée dans les foyers par des assiettes en métal ou en plastique. On mange d’habitude avec les doigts de la main droite (la main gauche étant considérée comme dévolue à des activités impures) mais peu à peu, les couverts font leur apparition sur les tables des classes moyennes et aisées.
Au cours de nos voyages, nous parlons systématiquement de l’ensemble de ses traditions au moment des repas que nous prendrons bien sûr tous ensemble.
Végétariens, ou non-végétariens.
Les restaurants en Inde annoncent pour la plupart la couleur sur leur enseigne : ils sont soit végétariens (« veg. » ou « pure veg. ») soit non-végétariens (« non-veg.»). On pourrait ainsi croire qu’au moins la moitié des habitants de la péninsule pratique le végétarisme. En fait, l’interdiction religieuse de consommer de la viande ne touche qu’une petite minorité d’Indiens. Seuls les brahmanes qui représentent 6 % de la population et les Jains (0,5 % de la population) sont strictement végétariens. On a beaucoup discuté des raisons du végétarisme indien, invoquant des fondements hygiéniques, économiques ou même écologiques et en cherchant un sens rationnel à cette pratique. Il semblerait qu’à l’instar de tous les tabous alimentaires, l’interdiction de manger de la viande animale ait avant tout une fonction identitaire. Les brahmanes et les Jains (qui ont souvent servi de modèle à ces premiers) se considèrent au sommet de l’échelle de la pureté. De ce fait, nombreux sont les hindous qui se disent végétariens, pour atteindre cet idéal de pureté et/ou être assimilés à la classe des dominants.
De votre côté, vous serez libres de consommer de la viande ou seulement des légumes, dans le respect de vos choix alimentaires. Nous essaierons de nombreuses traditions culinaires différentes, et vous pourrez goûter à des plats qui ne figurent pas au menu des restaurants indiens que l’on trouve en France.
Le Nord et le Sud
Il existe également un autre clivage dans les habitudes alimentaires indiennes que celui du végétarien ou non-végétarien, il est marqué par la division géographique Nord/Sud. Alors que le riz rentre dans la composition de presque tous les plats du Sud de l’Inde, on retrouve beaucoup plus de blé dans la cuisine du Nord de l’Inde principalement sous forme de pains (chapathis, naans ou parothas). Cela est dû au climat qui est plus propice à la culture du riz dans le Sud mais aussi à l’influence de la cuisine moghole très proche de la cuisine afghane, iranienne ou même libanaise dans le Nord… On mange aussi beaucoup plus de viande dans le Nord : du mouton, la viande la plus prisée (mouton rogan josh) mais aussi du poulet (au four – tandoori, ou en sauce – butter chicken) et du poisson comme au Bengale. Dans cet État, les brahmanes considèrent d’ailleurs que le poisson est un « fruit de la mer » et n’est donc pas sujet aux interdictions alimentaires.
En fait chaque région a développé une gastronomie avec ses particularités : celle d’Andhra Pradesh est ainsi la plus épicée, au Kerala on cuisine à l’huile de noix de coco, le Bengale est réputé dans toute l’Inde pour ses « sweets », pâtisseries à base de lait et de ghee très sucrées, et Goa pour ses petites saucisses de porc. Certains ne jurent que par le biryani tamoul et d’autres affirment que rien ne vaut un dhal makhni (préparation de lentilles) à Delhi. La gastronomie indienne est très riche et très diverse, les ingrédients changent suivant la région, la religion et la caste. Il existe aussi une cuisine typiquement musulmane et une cuisine chrétienne notamment dans les ex-colonies portugaises. On retrouve aussi des éléments de cuisine chinoise, très appréciée en Inde, dans certains plats de nouilles sautées et les Tibétains en exil en Inde ont fait découvrir leurs momos (raviolis de viande) à tous les non-veg. Ce qui lie toutes ces cuisines est un amour des épices, parfois un peu « surdosées » pour les papilles gustatives occidentales.
Il est difficile de faire le tour de la « cuisine indienne » ou plutôt des cuisines indiennes. Pour en avoir un aperçu, il faut pouvoir manger dans des contextes très différents : dans des familles de classes et de religions différentes, dans des grands restaurants végétariens ou non-végétariens, dans les « hotels » sortes de cantines bon marché qui servent un plat unique ou dans la rue pour un snack (en général des beignets de toutes sortes) ou un repas sur le pouce. Il ne faut pas négliger les petits déjeuners à base de galettes de riz (iddli ou dosa) et de chutneys délicieux, ni les classiques thalis (assiette de riz avec toute une variété de sauces et de légumes). Les meilleures surprises ne seront peut-être pas où on les attend, mais pour ceux qui sont curieux et à la recherche d’une gastronomie différente, l’Inde offre un territoire somptueux à explorer.
À ce titre, le voyage au Kerala que je vous propose de faire est orienté vers la remise en forme et le bien-être, ce qui passe aussi par une nourriture variée, saine et équilibrée. Les vertus des épices, des légumes et du poisson sur le métabolisme, le système immunitaire ou la digestion sont connues depuis des millénaires, et nous y accorderons une grande place au cours de ce séjour dédié au repos, au massage ayurvédique et à l’immersion dans la culture indienne.